Jacqueline de Quattro > Articles de presse  > Halte au diktat des 30km/h sur les axes principaux

Halte au diktat des 30km/h sur les axes principaux

Article paru dans Le Temps le 26.09.2025

La question de la réduction de la vitesse sur les axes principaux est une histoire sans fin. Dans toutes les grandes villes de Suisse et dans de plus en plus de communes, elle va de rebondissement en rebondissement, suscitant aussi bien l’exaspération des automobilistes qui veulent avancer que le mécontentement de ceux qui ambitionnent une limitation généralisée des 30 km/h dans les localités. Le Conseil fédéral vient d’écrire un nouvel épisode où le bon sens semble heureusement de retour.

Invité par le Parlement à modifier les règles, le Conseil fédéral a soumis en consultation un projet concernant une modification de l’ordonnance sur la circulation routière (OCR). Ce texte rappelle les règles en vigueur, à savoir que, sauf exception, la limite de 50 km/h est de rigueur pour les artères principales dans nos villes, nos communes et nos villages. Pour les quartiers d’habitation, il est possible de réduire la vitesse à 30 km/h, voire à 20 km/h dans les zones de rencontre. Le gouvernement apporte toutefois quelques innovations bienvenues.

Dorénavant, une commune devra mieux justifier une décision de baisse du régime de vitesse sur les axes conçus pour rouler à 50 km/h. Une étude de faisabilité précisera les conséquences d’une réduction de la vitesse sur la fluidité de la circulation.

Face aux injonctions politiques qui veulent imposer la vision unique du 30 km/h, le Conseil fédéral considère qu’une diversité des régimes de vitesse constitue une réponse adaptée à nos besoins de mobilité. Il recommande également que nos autorités municipales et cantonales recourent plus souvent au revêtement phono-absorbant.

Cette solution qui permet de réduire de manière considérable les émissions sonores des axes routiers est bien plus efficaces qu’un 30 km/h généralisé. Bien connue des communes et des villes, elle mérite d’être davantage soutenue.

Ce type de revêtement, qui a été développé dans les années 1980, contient des vides qui forment un réseau de petites « grottes », qui absorbent le bruit de la circulation. Les asphaltes les plus performants permettent de diminuer le bruit jusqu’à huit à neuf décibels lorsqu’ils sont nouveaux, puis environ trois à quatre décibels après une dizaine d’années. Le bruit du trafic routier peut ainsi être diminué de moitié, ce qui est loin d’être négligeable.

Un autre avantage de cette mesure est que la résistance au roulement est restreinte, ce qui favorise la réduction les émissions de CO2. La circulation est non seulement plus silencieuse, mais aussi plus facile et moins polluante. Ces constats ne sont pas tirés d’une brochure des professionnels de la construction mais ils émanent de l’Office fédéral de l’environnement (OFEV).

Par ailleurs, il est également démontré que la voiture électrique atténue considérablement le bruit routier en milieu urbain. Dans les phases de décélération et d’accélération, la charge sonore est abaissée de trois décibels.

Avec ses modifications, le Conseil fédéral contribue à améliorer la qualité de vie des habitants de donc nos villes, communes et villages sans entraver inutilement les automobilistes. Son message aux décideurs est clair : arrêtez-vous de vous entredéchirer sur la vitesse. Projetez-vous plutôt dans l’avenir et pariez sur la technologie. La Suisse est le champion de l’innovation.

D’autant plus que notre pays vise la conversion du parc de véhicules à l’électrique à horizon 2050. Il serait donc judicieux de combiner cet objectif avec des régimes différenciés de vitesse et des revêtements phono- absorbants en plus grande quantité.

La manière dont les autorités municipales et cantonales réagiront aux mesures du Conseil fédéral sera intéressante. Continueront-elles d’ignorer le verdit du peuple (79,7% et unanimité des cantons !) qui a clairement rejeté l’idée d’une régulation généralisée de la ville à 30 km/h en localités ? Ou poursuivront-elles leur tendance à vouloir faire le bonheur de la population contre elle-même ? Il est temps de cesser ces combats stériles et idéologiques et de penser à l’intérêt général.

Le Conseil fédéral offre aux autorités cantonales et communales de nouvelles opportunités : elles méritent d’être sérieusement étudiées. Leur mise en œuvre mettrait un terme à une guerre de clocher. Faisons preuve de pragmatisme et refusons le diktat des 30 km/h généralisé.

Jacqueline de Quattro

Conseillère nationale