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La maîtrise de notre souveraineté, un des grands défis de demain

Article paru dans le Temps, le 2 juin 2020

Le coronavirus a bouleversé notre quotidien. Il a changé nos comportements, bousculé nos certitudes et remis en cause nos modes de vie. Il a révélé la fragilité et la vulnérabilité du système aussi bien au niveau sanitaire qu’économique. Il a mis en évidence notre dépendance à l’égard de certains Etats.

Une question s’impose à nous : quel monde voulons-nous ? Certains le désirent plus solidaire. Plus protectionniste. Plus nationaliste. Ou encore pus durable. C’est en effet une aberration de voir certaines chaînes de productions étalées sur l’ensemble de la planète. Il devient donc urgent de s’interroger sur le monde de demain et de réfléchir à des modèles démocratiques qui permettent à chaque pays de décider davantage de son propre destin.

Aujourd’hui, des voix, en Suisse et à l‘étranger, relancent la question de la souveraineté. Une souveraineté qui s’inscrit dans un esprit d’indépendance et non pas dans une logique d’isolement et de repli sur soi. Une souveraineté qui ne galvanise ni le nationalisme ni le protectionnisme mais qui fortifie notre exigence de liberté et de démocratie. Qui mieux que la Suisse peut témoigner des vertus de la souveraineté, ciment de notre démocratie depuis 1291 et servir ainsi d’exemple.

Ce sursaut souverainiste ne vise pas à bannir la mondialisation ni de prôner une décroissance contrainte. Mais la crise actuelle nous offre l’opportunité de consolider notre souveraineté dans les domaines économique, sanitaire, agricole, environnemental et technologique. Une nouvelle voie pour un paradigme économique et sociétal non seulement plus indépendant mais aussi plus responsable et plus durable.

La durabilité et la crise sanitaire illustrent bien ce besoin de souveraineté. Prenons l’exemple du réchauffement climatique. Certaines sources de production sont connues pour contribuer à l’augmentation du CO2, néfaste pour notre environnement. Pourquoi vouloir consommer des biens en provenance du bout du monde alors qu’ils pourraient être produits en Suisse. Autre exemple au niveau sanitaire: si notre pays a manqué de masques, d’appareils respiratoires, la raison est simple: ils étaient fabriqués à l’étranger. Le coronavirus a d’ailleurs été le révélateur de la montée en puissance de la Chine.

Il devient donc urgent de retrouver des équilibres entre la croissance et la qualité de vie. Inciter l’économie à miser sur des modèles d’affaires axés davantage sur des chaînes de productions ancrées localement, investir dans des énergies renouvelables et locales, utiliser de manière plus durable les ressources, grâce notamment à l’économie circulaire.

Ceux, qui pensent que la relocalisation des entreprises coûtent trop cher, ont une réflexion à court terme. La délocalisation des entreprises entraîne des coûts sociaux élevés avec les pertes d’emplois, un abandon du savoir-faire, une dislocation du tissu industriel. Au contraire la relocalisation permet la consolidation et la création d’entreprises à forte valeurs ajoutée, tout en préservant la durabilité et en renforçant notre souveraineté.

Moins dépendre de l’étranger ne signifie pas refuser de travailler avec le reste de la planète. La mise en réseaux des connaissances est essentielle pour découvrir, par exemple, un vaccin au coronavirus. Etre indépendant implique donc plus de coopération. Si nous voulons répondre efficacement à de nouvelles crises, nous devons oeuvrer ensemble.

La maîtrise de notre souveraineté sera l’un des grands défis de demain. Pourtant, la tentation est grande de revenir au système d’avant le Covid. Crise économique oblige. Ne manquons pas l’occasion de repenser un modèle de société où la souveraineté n’est plus considérée comme un tabou mais comme une force qui nous pousse à nous réinventer. Car le monde de demain sera celui que nous façonnerons.

Jacqueline de Quattro
Conseillère nationale PLR